Entretien avec Mr Le Maguet, RUPN de Saint-Vincent
La veille du confinement, l’Apel s’apprêtait à vous sonder sur l’utilisation des tablettes à l’école et à la maison, sujet largement débattu. Nous y avons sursis car les questions ne se poseraient plus tout-à-fait dans les mêmes termes avec l’école à distance, l’outil s’étant imposé finalement comme le vecteur de la continuité pédagogique. Pour poursuivre la réflexion, nous avons interrogé M. Le Maguet, référent pour les usages pédagogiques numériques à Saint Vincent, pour nous dévoiler la face cachée de l’apprentissage par le numérique.
APEL : M. Richard Le Maguet, quelle est a été votre parcours ?
Mr Le Maguet : J’ai d'une double formation universitaire. Après l’obtention d’un DEA en Histoire contemporaine, j’ai acquis un DESS (Master 2) en informatique à l’Ifsic à Rennes. J’ai d’abord commencé à enseigner l’informatique au lycée et en « Maths Sup » dans deux établissements différents au début des années 90. Puis l’enseignement de cette discipline a été arrêté au lycée, j’ai alors dispensé des cours d’Histoire et de géographie (en BTS CI et Tourisme notamment) tout en donnant toujours quelques cours d’algorithmique en MPSI et PCSI jusqu’en 2009. Ensuite, je suis arrivé à Saint Vincent. En 2014, le directeur de l’époque m’a sollicité pour devenir Référent pour les usages pédagogiques numériques (RUPN) et coordinateur informatique. J’ai alors pris la suite d’un collègue qui avait développé en binôme un Environnement Numérique de Travail (ENT) très avant-gardiste.
APEL : C’était avant le projet « tablette » alors?
Mr Le Maguet : Oui. Le projet iPad, porté par l’actuel directeur, est venu se greffer à cet environnement numérique, déjà bien développé. Il a été initié progressivement dans le cadre d’une classe pilote en Seconde, après une tentative non concluante de classe mobile. Cette expérience a été reconduite l’année suivante ; le projet était sur les rails. A la rentrée 2020, tous les élèves du lycée seront équipés ainsi que trois niveaux sur quatre au collège. J’en profite pour préciser que le choix d’Apple tient avant tout à sa fiabilité et à sa sécurité.
APEL : Quel est votre rôle en tant que référent numérique ?
Mr Le Maguet : De manière générale, je suis en charge de la formation des collègues en interne, de la veille technologique et pédagogique, du fonctionnement de l’ENT de l’établissement pour la partie pédagogique, de l’attribution des manuels numériques… Avec mon collègue de la partie technique, Cyrille Delattre, je m’occupe également du MDM (Mobile Device Management), outil avec lequel sont gérés les iPad (applications, mises à jour, restrictions…). Je participe à la liaison avec nos différents prestataires informatiques afin d’assurer le bon fonctionnement pédagogique, qui passe forcément par une partie technique. Et je travaille aussi en liaison avec le personnel administratif. En tant que référent, je continue également à me former. Je suis certifié APLS (Apple Professional Learning Specialist), ce qui me permet de dispenser des formations dans d’autres établissements du Grand Ouest.
APEL : Avez-vous ressenti des réticences face à ce projet et comment traitez-vous les objections?
Mr Le Maguet : Comme dans tous domaines, la nouveauté est plus ou moins facile à faire accepter. La réticence a pu parfois venir de la crainte de ne pas maîtriser l’outil. La crainte de certains parents venait du risque de divertissement offert par la tablette ou l’accès à des sites non souhaités.
La formation et la communication s’avèrent ici primordiales. Une fois l’iPad enrôlé dans notre système, il est totalement sous contrôle. Pendant les cours, les professeurs peuvent limiter la tablette comme ils l’entendent. Ils proposent aux élèves par exemple, l’ouverture d’une application unique. Il est possible de les contraindre à n’ouvrir qu’un seul site sur le navigateur et/ou de les priver d’Internet. Le soir le contrôle parental prend la relève.
L’apprentissage des règles s’intègre à la pédagogie. Nos élèves qu’on le veuille ou non sont issus d’une génération « née avec un smartphone dans la main». Il est fondamental de revoir avec eux les règles, les lois, les interdits. La charte informatique s’adapte à l’âge des élèves. Les restrictions sont moindres en terminale qu’en 6ème. Cependant, l’établissement conserve la maîtrise de la surveillance des iPad durant toute la scolarité. Et ce, afin de rassurer aussi bien les parents que les professeurs.
L’iPad n’a pas non plus vocation à se substituer à toutes autres formes d’enseignement. Un cours magistral, une anecdote du « vieux prof » permettant de mémoriser un épisode de l’histoire ou un théorème fonctionne toujours.
L’iPad est incontestablement un plus. C’est ainsi qu’il faut l’appréhender. La tablette est un outil supplémentaire avec lequel l’élève peut réaliser des travaux en classe ou à la maison qu’il ne pourrait effectuer sans.
APEL : Quelle valeur est ajoutée à la pédagogie selon vous ?
Mr Le Maguet : Avec l’iPad, un élève peut produire de petits films, construire un raisonnement appuyé par l’image, enregistrer ses commentaires. Il lui est possible de créer sa propre capsule vidéo qu’il regardera à l’envi et d’en recevoir de son professeur dans le cadre de cours inversé… Les exemples sont nombreux. Nos élèves dyslexiques apprécient particulièrement l’apport de certaines fonctionnalités, cela contribue énormément à leur intégration. La variété des formes de mémorisation est facilitée. J’ajouterai que l’utilisation de l’iPad développe l’auto-formation puisque l’élève est acteur dans son apprentissage.
APEL : Comment avez-vous appréhendé le numérique pendant dans la crise sanitaire?
Mr Le Maguet : Cette crise sanitaire a été très légèrement anticipée du fait des clusters apparus au sud de Rennes. Nous avons commencé à regarder quels outils pouvaient être les plus propices à la fameuse continuité pédagogique. On se serait volontiers passé d’une telle crise pour prouver l’intérêt du numérique. Mais force est de constater que la plupart de nos élèves possédait de facto un outil numérique permettant la visualisation des vidéoconférences. Au début de la crise, j’ai reçu beaucoup de demandes d’aide de collègues, d’élèves. Il fallait bien-sûr être en possession de ses codes de connexion, être certain d’avoir à disposition les bonnes applications et leur maîtrise. Grâce à notre ENT Ecole Directe, il est possible de mettre très rapidement à disposition des tutoriels vidéo. Ces tutoriels sont accessibles à toute la communauté de l’établissement (Profs, élèves, parents…).
Au début du confinement, il a surtout été important de s’entendre collectivement sur les outils à prioriser afin de ne pas perdre les élèves. Notre ENT a été la référence avec le cahier de texte numérique. Zoom a été l’application de vidéoconférence privilégiée. Le problème majeur pour certains relevait de la connexion internet. En effet, un foyer constitué de parents et d’enfants en situation de télétravail exige une grande bande passante. Difficile dans ce cas d’exiger la connexion assidue des élèves. Mais dans l’ensemble cela s’est plutôt bien passé. L ‘essentiel a pu être assuré. les programmes ont pu être achevés. Profs et élèves se sont découverts sous de nouveaux aspects. On a pu noter l’intérêt pédagogique de l’outil numérique et en l’occurrence son impérieuse nécessité dans le cas présent. Des élèves ont produit des travaux remarquables durant ce confinement et certains professeurs moins enclins à utiliser l’iPad sont presque devenus des « geeks »
APEL : L’iPad a donc bénéficié d’un « effet collatéral Covid »…
Mr Le Maguet : A la veille du confinement, un sondage a été réalisé auprès des profs et des élèves de 1ères sur l’usage de la tablette en classe. A la question « l'iPad vous donne-t-il des possibilités supplémentaires d’apprentissage ? », 86% des élèves répondant ont répondu oui - et ils ont massivement répondu à ce sondage, je les en remercie encore. Du côté des professeurs, 39% ont répondu « oui vraiment » et 28% « oui un peu ». Il serait intéressant d’effectuer le même sondage auprès des mêmes utilisateurs afin de comparer les résultats et ressentis après confinement. Récolter le sentiment des parents serait aussi instructif.
Je vous approuve : pour gagner, les parents doivent être de la partie. Un dernier mot ?
Mr Le Maguet : Gardons à l’esprit que l’iPad n’est qu’un outil ; il ne doit pas devenir le maître.
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